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RFC 5377: Advice to the Trustees of the IETF Trust on Rights to be Granted in IETF Documents

Date de publication du RFC : Novembre 2008
Auteur(s) du RFC : J. Halpern (Self)
Pour information
Réalisé dans le cadre du groupe de travail IETF ipr
Première rédaction de cet article le 11 novembre 2008


Une fois les droits de publication, et de modification, offerts par le(s) auteur(s) d'un RFC à l'IETF trust, quels droits ce dernier va t-il transmettre aux lecteurs d'un RFC ? Le RFC 5378 spécifiait les droits « entrants » à l'IETF trust, et notre RFC 5377 spécifie les droits sortants : que puis-je faire avec un RFC ? Ai-je le droit de le lire ? De le redistribuer ? De le traduire ? (Il a depuis été remplacé par le RFC 8721.)

Pendant longtemps, l'IETF avait été réputée plus généreuse que les autres SDO car ses RFC étaient distribués librement (alors que l'ISO ou l'ITU faisaient payer une somme considérable, qui n'était même pas justifiée par les frais de distribution puisque ces dinosaures interdisaient la reproduction et la redistribution). Mais les temps ont changé : d'autres SDO ont suivi ce chemin, à commencer par le W3C, certaines organisations traditionnelles se sont ouvertes, comme l'ITU. L'IETF est désormais dans la moyenne, plus ouverte que l'ISO mais beaucoup moins que le W3C ou OASIS.

Compte-tenu de cette tendance à l'ouverture, et du développement du logiciel libre, accompagné d'un mouvement en faveur de formats ouverts, l'IETF devait donc libéraliser sa politique de licence, qui était spécifiée dans le RFC 3978. Celle-ci spécifiait notamment que les RFC étaient distribués et redistribués librement mais que toute modification était interdite. Ce problème n'était pas purement théorique : du texte issu de RFC se retrouve souvent verbatim dans des documentations de logiciel ou dans des manuels en ligne comme la page getaddrinfo (RFC 3493) sur beaucoup d'Unix. Le texte du RFC n'étant pas modifiable, ce logiciel devenait non libre. Pire, les RFC comportent souvent du code (définitions des MIB, exemples de code, schémas XML, implémentation du protocole, etc) et celui-ci n'était pas non plus modifiable et ne pouvait donc pas être inséré dans un logiciel libre !

Il était donc nécessaire de libéraliser. Mais une partie de la « vieille garde » de l'IETF s'est opposé à toute évolution et ce RFC 5377 ne représente donc finalement qu'une libéralisation très modérée. La principale innovation par rapport au RFC 3978 est la séparation du RFC entre code et texte, avec des règles différentes, plus ouvertes pour le code.

La section 1 du RFC rappelle un point important : c'est désormais l'IETF trust qui décide. Le RFC 5377, publié par l'IETF, n'est qu'indicatif et ne fixe que des grands principes. Le texte exact de la licence des RFC est écrit par l'IETF trust (http://trustee.ietf.org/license-info/ et il existe aussi une FAQ sur ces textes.) La section 2 revient d'ailleurs sur les raisons de ce choix (pouvoir s'adapter aux changements légaux aux ÉUA, pays de l'IETF trust et de l'ISOC).

On pourra trouver ce texte standard, ce boilerplate, sur le site du Trust.

La section 2 du RFC décrit les buts que suit l'IETF en publiant des RFC (cf. RFC 3935). Clairement, l'élaboration d'une licence doit se faire en gardant ces buts à l'esprit : faire fonctionner l'Internet le mieux possible.

La section 3 explique l'articulation de ce RFC avec le RFC 5378 : les droits sortants (ceux que l'IETF trust accorde aux utilisateurs) doivent être inférieurs ou égaux aux droits entrants (ceux que l'auteur a accordé à l'IETF trust). Autrement dit, l'IETF ne peut pas donner de droits qu'elle n'a pas. Si l'auteur d'un RFC interdit toute modification à son texte, le RFC publié ne permettra pas de modifications (et ne pourra d'ailleurs pas être publié sur le chemin des normes).

La section 4 s'attaque aux droits que l'IETF trust devrait donner aux utilisateurs :

  • Droit de publier et de republier (section 4.1), une très ancienne politique de l'IETF,
  • Droit (évidemment) d'implémenter la technique décrite dans le RFC (section 4.3). C'est ici qu'apparait la distinction entre code et texte. Par un mécanisme non spécifié dans le RFC (cela a été choisi par la suite comme une liste publiée par l'IETF trust), le code sera marqué spécialement et l'implémenteur aura davantage de droits sur le code, notamment le droit de modification. Cela ne résout pas, et de loin, tous les problèmes. Par exemple, cela ne permet pas de modifier du texte d'un RFC qui est inclus dans la documentation d'un logiciel.
  • Droit de modifier le texte ? Non, ce droit est exclu par la section 4.4. La montagne a donc accouché d'une souris : si ce RFC représente une libéralisation, elle reste très modérée et limitée au code.

Les discussions sur le groupe de travail IPR ont été longues et passionnées. Elles opposaient surtout la vieille garde IETF, attachée à ne rien changer et effrayée par les changements survenus avec le développement du logiciel libre, mais aussi du Web (avec ses mashups, son Wikipédia et autres preuves de l'importance du droit de modification) aux partisans du logiciel libre comme Simon Joseffson ou Lawrence Rosen. Notons que Joseffson a écrit quatre RFC, comportant souvent du code. Je cite ce point car un des arguments les plus vicieux d'un débat qui en a compté beaucoup était que les partisans d'une libéralisation n'avaient jamais écrit de RFC et donc devaient se taire !

Pourquoi donc cet acharnement à refuser les modifications ? La raison la plus souvent invoquée était le désir d'éviter l'apparition de « RFC non officiels », incompatibles avec les « vrais », qui pourraient semer la confusion. Ainsi, un « méchant » pourrait créer un document mettant à jour le RFC 5321 en remplaçant EHLO par GDAY. Outre que cette « attaque » reste très théorique, plusieurs participants ont fait remarquer que les nouvelles règles ne l'empêchent pas et que la seule protection contre ce genre de problèmes serait dans le droit des marques, par exemple en faisant déposer la marque RFC pour empêcher le document du méchant de se présenter comme RFC. Or, ce point n'a jamais été considéré...

Notons enfin que beaucoup de participants à l'IETF n'ont pas du tout suivi ce qui se passait dans ce petit groupe, en général par manque d'intérêt pour les questions politiques et juridiques.


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