Date de publication du RFC : Mai 2012
Auteur(s) du RFC : N. Duffield (AT&T Labs-Research), A. Morton (AT&T Labs), J. Sommers (Colgate University)
Chemin des normes
Réalisé dans le cadre du groupe de travail IETF ippm
Première rédaction de cet article le 7 mai 2012
Le RFC 7680 définissait une métrique (une grandeur mesurable et spécifiée rigoureusement) pour le taux de pertes de paquets entre deux points du réseau. Mais un certain nombre de logiciels ne sont pas sensibles uniquement à la moyenne du taux de pertes mais aussi à sa répartition. Sur un flot de cent paquets, ce n'est pas la même chose d'en perdre trois, répartis au hasard, et d'en perdre trois de suite, par exemple pour certains protocoles multimédia qui encodent les différences entre paquets. Ce nouveau RFC définit donc des métriques pour caractériser les épisodes, ces pertes consécutives de paquets.
Par exemple, au taux de pertes moyen du RFC 7680, il serait intéressant d'ajouter la durée maximale d'un
épisode, ou bien la durée moyenne d'un épisode. Prenons les deux flots
suivants, où OK indique un paquet arrivé et LOST un paquet perdu : OK -
OK - LOST - LOST - LOST - OK - OK - OK - LOST - OK, puis LOST - OK -
LOST - OK - LOST - OK - LOST - OK - OK - OK.Le taux de pertes
moyen (Type-P-One-way-Packet-Loss-Average
du RFC 7680) est de 0,4 (40 % de paquets perdus) dans les
deux cas. Mais la longueur maximale d'un épisode est de 3 dans le
premier cas et de 1 dans le second, ce qui peut être important pour
certains protocoles, et n'apparaissait pas dans la moyenne. Ainsi, un
flux MPEG comporte des trames plus importantes
que les autres, les I-frames, et la perte de
paquets immédiatement consécutifs à la perte d'une
I-frame est peu importante (sans la
I-frame, ils ne servent à rien).
Première leçon à tirer de ce simple exemple, la notion de perte de paquets est une notion complexe dans l'Internet, où le trafic connaît des pics brutaux. Le modèle trivial de Bernoulli, où chaque perte est indépendante des autres, est clairement inadapté. De la même façon, comme illustré au paragraphe précédent, la simple moyenne n'est pas une description quantitative suffisante du phénomène. Des modèles plus markoviens ont été proposés (voir section 7), avec la notion d'épisode (période pendant laquelle on perd tous les paquets), en modélisant par des transitions entre une période normale et un épisode de pertes. Des RFC comme le RFC 3357 ou le RFC 3611 avaient déjà exploré cette voie. Mais ces modèles ne semblent pas avoir démontré d'intérêt pratique. L'approche de notre RFC est plus empirique : observer et quantifier le phénomène, sans chercher à le modéliser. Plusieurs mesures ont déjà été proposées comme l'IDC (Index of Dispersion of Counts) mais avec peu de succès. Notre RFC représente donc une nouvelle tentative pour décrire ce phénomène.
Ce RFC 6534 utilise des paires de paquets,
l'intervalle entre deux paquets indiquant la résolution temporelle de
la mesure (les épisodes plus courts que cet intervalle ne seront pas
vus). Première métrique définie, qui sert de base (section 2),
Type-P-One-way-Bi-Packet-Loss
. (Un
Bi-Packet = une paire.) La mesure donne (0, 0) si
les deux paquets sont arrivés, (1, 1) si les deux sont perdus,
etc. (Ce n'est peut-être pas intuitif mais le chiffre binaire indique
s'il y a eu une perte, donc 0 signifie le succès de la transmission.)
Ensuite, comme pour le RFC 7680, des
métriques moins élémentaires et plus utiles sont spécifiées à partir
de celle-ci. La section 3 définit
Type-P-One-way-Bi-Packet-Loss-Stream
, une suite
de résultats de la métrique précédente. Pour le premier exemple de cet
article, ce sera ((0, 0), (0, 1), (1, 1), (1, 1), (1, 0), (0, 0), (0, 0), (0,
1), (1, 0)). (0, 1) indique une transition vers un épisode de perte, (1, 0) la fin de cet épisode. La section 4
précise la même suite pour le cas où les intervalles de temps entre
paquets forment une distribution
géométrique.
Jusque là, l'intérêt pratique de ces définitions semble
faible. Avec la section 5, on en arrive presque à des métriques
utilisables (mais patientez encore un peu, le RFC parle de
« proto-métriques » pour la section
5). Par exemple, Loss-Pair-Counts
indique les fréquences de
chaque paire (dans l'exemple précédent 2/9 - 22 % - de (1,
1), 3/9 de (0, 0), 2/9 de (1, 0) et 2/9 de (0,
1). Bi-Packet-Loss-Episode-Duration-Number
, elle,
caractérise la longueur des épisodes (2 ici, car on ne compte pas le
premier paquet des épisodes de perte).
Et ensuite, en section 6, on définit les métriques de plus haut
niveau, la
Type-P-One-way-Bi-Packet-Loss-Geometric-Stream-Ratio
pour le pourcentage de paquets perdus, la
Type-P-One-way-Bi-Packet-Loss-Geometric-Stream-Episode-Duration
pour la durée (en secondes) des épisodes, la
Type-P-One-way-Bi-Packet-Loss-Geometric-Stream-Episode-Frequency
la fréquence des épisodes de perte, etc.
Voilà, nous avons maintenant nos métriques (je vous ai épargné la définition rigoureuse, indispensable mais aride : lisez le RFC pour la connaître).
Ah, un mot pour les juristes : il y a même eu des requins pour breveter des métriques, et des bureaux des brevets pour l'accepter. Voir la déclaration #1354.
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